Vraie fausse alerte

4 novembre 2015

Vraie fausse alerte

Vers 3 heures du matin, on se réveille, ça sert un peu dans la poitrine. On se lève, on va boire un verre de lait frais du frigo (depuis qu'on a plus de vaches, on a des frigos...) et on va se recoucher. 10 minutes après ça sert encore plus fort et en plus ça pique, juste là sous le sein gauche. On se tourne et retourne dans le lit en essayant de pas réveiller Chèrètendre. On regarde les chiffres rouges sur le réveil : 03:25, 03:26, 03:27....

Un quart d'heure après ça fait encore plus mal, ça pique de plus en plus.

On réveille Chèrètendre.

Urgences. Ça clignote rouge. Il est 04:07 à la pendule de l'entrée (et pas midi, Claude..).

Vous avez votre carte Vitale ? Vitale, pourquoi elle dit vitale ?

Brancard, en caleçon chemise blanche avec des petits carreaux. Pas moche.

Perfusion au bras gauche. Prise de sang.

14 petits électrodes sur le buste. Devant et dos. 14 dérivations.

Une petite pince au bout de l'index gauche.

Un brassard pour la tension au bras droit.

04:22

Un écran avec 3 lignes : en haut le rythme cardiaque, au milieu le pouls, en bas la fréquence respiratoire. Plus en bas dans un coin de l'écran la tension qui vient du brassard qui se gonfle et se dégonfle toutes les 15 minutes. Mise à jour des données.

Et puis des gens. Plein de gens. Avec des étiquettes : Ziineia médecin chef, Paul médecin de garde, Eric interne, Claude externe, Cécile infirmière, Isabelle aide-soignante, Zaza service nettoyage, Richard service technique....

Ça tourne autour du brancard, ça touche (pas tout le monde...). Ça émet des suppositions, ça propose des causes et des raisons... Chacun qui passe pose une question. Vous avez quel âge ? C'est la première fois que ça vous arrive ? Y-a-t-il des antécédants dans votre famille ? Vous fumez ? Vous buvez ? Vous avec une prothèse dentaire ?....

On s'endort, pas mort.

On se réveille parceque ça bouge. Radiographie de la cage thoracique. Retour. Sur la porte S.A.U.V. J'avais pas vu : salle d'accueil des urgences vitales.

Il fait froid. Le courant d'air de la climatisation sur les pieds. Un drap. Merci beaucoup. Ça va, ça vient, ça papote, ça dit des banalités, presque des conneries, ça rigole aussi.

08:00. La relève. Plein de gens. Des autres. Avec des étiquettes : Laurent médecin chef, Jacques médecin de garde, Ludovic interne, Zacharia externe, Anne-Laure infirmière, Martine aide-soignante, Zaza (toujours là) service nettoyage, Luc service technique....

Ça retourne autour du brancard, ça retouche (pas tout le monde...). Ça reémet des suppositions, ça repropose des causes et des raisons... Chacun qui passe repose une question. Vous avez quel âge ? C'est la première fois que ça vous arrive ? Y-a-t-il des antécédants dans votre famille ? Vous fumez ? Vous buvez ? Vous avec une prothèse dentaire ?....

Il faut laisser la place aux autres. On vous emmène dans un service de suite. Le médecin viendra pour les résultats de la prise de sang. On en fera une autre à 10:00. ZSTCD zone de surveillance de très courte durée.

Une salle. 8 brancards dedans 2 dehors dans le couloir. On est dedans, c'est mieux ?!

A gauche une vieille, très vieille dame. A vue de nez sa poche est pleine.

A gauche une autre dame. J'ai pris des cachets. Je voulais sauter par la fenêtre mais maintenant ça va, je veux rentrer.

Plus loin un monsieur qui dort la bouche ouverte, un gros pansement sur le bras.

Sur une chaise une jeune fille. Quand c'est que je vois le psychiatre ? On a le droit de fumer ? Qui c'est qui vient me chercher ?

Les infirmières stoïques. Pas un mot plus haut que l'autre. Gentilles avec tout le monde, même la jeune fille qui pose les mêmes questions depuis deux heures. Le médecin va venir. Pour fumer il faut aller dehors. On a prévenu votre famille, ils vont venir.

Non madame, il faut pas enlever le brassard. Vous êtes en surveillance. Ne bougez pas.

Des brancardiers arrivent. On vient chercher madame Lombard. On l'emmène en gériatrie un lit s'est libéré (!)....

Le monsieur là, c'est pour la chir ? Ok, on l'emmène. Y'en a un autre dans le couloir, on le met à la place.

10:10 deuxième prise de sang. On a plus mal du tout. On voudrait bien des résultats pour pouvoir partir. On commence à trouver le temps long. Le brancard ça fait mal au coccyx.

Allo, oui madame, il est là je vous le passe. C'est Chèrètendre.

12:54 vous avez pas encore les résultats ? C'est long.

J'ai plus envie de rester allongé. J'ai rien mangé depuis hier soir. J'ai faim. Des plateaux repas arrivent. Pas pour vous, vous ne restez pas. Mais vous ne partez pas encore. Un tour au toilettes, ça sent la clope. Faut aller dehors mademoiselle....

14:55 un interne. On sait pas bien ce qui vous est arrivé. On va vous donner une ordonnance pour un traitement préventif. Si ça recommence revenez.

3 minutes. 4 heures d'attente.

Chèrètendre est au bout du couloir. Vite, on sort à moitié habillé.

Tout va bien. Faut que j'aille voir mon médecin traitant demain.